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Parution

Imagerie par corrélation de speckles à travers une fibre multimode kaléidoscopique

Parution Recherche Le 27 juin 2023

Le premier kaléidoscope a été réalisé au début des années 1800 par Sir David Brewster, qui fut séduit par la beauté des motifs générés, à la fois symétriques et très complexes. Dans une récente étude menée au sein du Laboratoire interdisciplinaire de physique de Grenoble (LIPhy - CNRS/UGA) et publiée dans PNAS, des scientifiques démontrent que l'effet kaléidoscopique, au-delà de sa fonction artistique, peut être utilement exploité par les scientifiques travaillant avec des fibres optiques.

Le développement des endoscopes par fibre optique est motivé par certaines applications biomédicales telles que l'imagerie cérébrale. Les fibres multimodes, dont la taille est typiquement comparable à celle d'un cheveu, sont d'excellentes candidates afin de minimiser le caractère invasif de ces procédures. Cependant, la propagation de la lumière dans les fibres multimode est très complexe. En effet, dans ce type de fibres, la lumière se propage de manière imprédictible, produisant des motifs difficiles à interpréter en sortie de fibre. Des techniques existent actuellement afin de reconstruire des images à partir de tels motifs, mais ces techniques sont très sensibles aux déformations appliquées à la fibre, ce qui limite fortement les possibilités d’applications en biologie.

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Dans cette étude, des scientifiques du LIPhy démontrent qu’il est possible de produire des images intelligibles avec des fibres multimodes même lorsque celles-ci sont déformées. Pour cela, ils se sont inspirés du kaléidoscope de Sir David Brewster, et ont troqué les fibres habituelles, qui possèdent un cœur circulaire, pour des fibres à cœur carré. En effet, les propriétés de symétrie de ces fibres génèrent un effet kaléidoscopique remarquable, qui transporte de l'information de manière robuste aux déformations. Ils ont testé cette méthode en reconstruisant des images de micro-sources fluorescentes à travers la fibre, alors même que celle-ci était déformée de manière aléatoire, reproduisant ainsi l'aspect dynamique des perturbations qui se produisent typiquement lors de l'étude d’organismes vivants. Ils ont ainsi démontré que, malgré ces perturbations, il est possible de reconstruire des images fidèles de ces micro-sources à travers la fibre. Cette nouvelle technique s’annonce ainsi prometteuse pour le développement d’endoscopes miniatures pour l’imagerie biomédicale.

Références :

Speckle-correlation imaging through a kaleidoscopic multimode fiber
Dorian Bouchet, Antonio Miguel Caravaca-Aguirre, Guillaume Godefroy, Philippe Moreau, Irène Wang, Emmanuel Bossy. PNAS - Juin 2023. DOI

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Effet kaleidoscopique illustré ici avec le logo imprimé du laboratoire

Les courants ioniques à la base de la génération du potentiel d’action

Parution Le 9 mai 2023

Le potentiel d’action, c’est-à-dire le signal électrique fondamental qui transmet l’information dans le cerveau, démarre dans le segment initial de l’axone.

Il génère grâce à l’activation rapide des canaux sodiques voltage-dépendent qui occasionnent le courant sodique responsable de la phase montante de l’impulse nerveuse. En utilisant une combinaison de techniques d’imagerie ultrarapide et un nouveau peptide sélectif pour le sous-type de canal sodique Nav1.2, des chercheurs du LIPhy ont analysé la génération du potentiel d’action dans l’axone des cellules pyramidales corticales de la souris [*]. Cette recherche a démontré que le canal sodique Nav1.2 produit également un courant calcique qui active le canal potassique BK en déterminant la forme du potentiel d’action. Cette découverte avance notre connaissance de la génération du potentiel d’action et peut être important dans la compréhension des nombreuses pathologies associées à l’excitabilité nerveuse.

Reference :

[*] Filipis L, Blömer LA, Montnach J, Loussouarn G, De Waard M, Canepari M. Nav1.2 and BK channel interaction shapes the action potential in the axon initial segment. J Physiol. 2023 Mar 22. doi: 10.1113/JP283801.

Séquence des courants ioniques
Séquence des courants ioniques qui déterminent la forme du potentiel d’action dans le segment initiale de l’axone

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Marco CANEPARI
marco.canepariatuniv-grenoble-alpes.fr (marco[dot]canepari[at]univ-grenoble-alpes[dot]fr)

Laila A. BLOMER
laila.blomeratuniv-grenoble-alpes.fr (laila[dot]blomer[at]univ-grenoble-alpes[dot]fr)

Sonder la mécanique des tissus biologiques en utilisant leurs propres cellules comme actuateurs

Parution Recherche Le 28 février 2023

En combinant ingénierie tissulaire et optogénétique, des biophysiciens ont transformé des cellules en micro-actuateurs biologiques afin d'étudier la propagation spatio-temporelle des signaux mécaniques dans les tissus biologiques et de caractériser l'architecture et les propriétés viscoélastiques de ces tissus.

In vivo, les cellules appliquent des forces sur leur environnement afin de se déplacer, de se diviser ou de modifier cet environnement, mais aussi afin de communiquer et de se coordonner avec leurs voisines à longue distance. Dans les approches standards, l'exploration de ces mécanismes se fait par le biais d'actuations mécaniques externes qui visent à imiter ces signaux mécaniques. Toutefois, il reste difficile d'évaluer comment ces stimuli externes se comparent aux contractions que les cellules exercent spontanément. Par ailleurs, des traitements biochimiques permettent de moduler les processus cellulaires responsables de ces signaux, mais leur incapacité à cibler des zones de tissus définies dans l'espace et leur faible résolution temporelle, limitent fortement leur potentiel. Dans cet article une nouvelle approche est proposée afin d'élucider comment les forces cellulaires sont générées, propagées et détectées dans les tissus physiologiques et pathologiques.

Des biophysiciens du Laboratoire Interdisciplinaire de Physique de Grenoble (CNRS - Univ. Grenoble Alpes) ont cherché à sonder les propriétés mécaniques des tissus biologiques "de l'intérieur", comme le font naturellement les cellules. Pour cela, ils ont combiné ingénierie tissulaire et optogénétique. L'ingénierie tissulaire leur a permis de générer des microtissus tridimensionnels, composés de fibroblastes encapsulés dans du collagène, suspendus entre deux micropiliers dont la déflexion permet de suivre la tension tissulaire en temps réel. L'approche optogénétique consiste à modifier génétiquement les fibroblastes afin de contrôler par la lumière l'activité d'un régulateur majeur de leur contractilité. Grâce à la résolution spatiale et temporelle des stimulations lumineuses, ils ont induit des contractions locales dans ces microtissus, tout en mesurant les déformations en résultant. Ils ont ainsi quantifié les propriétés viscoélastiques de ces microtissus, du "point de vue" des cellules, et ont démontré le potentiel de cette approche pour quantifier l'impact du collagène ou de l'initiation d'une fibrose sur l'élasticité tissulaire. La possibilité d'illuminer seulement une partie du tissu leur a permis de cartographier les anisotropies locales dans des microtissus hétérogènes et d'influencer la formation de ces tissus. Ces résultats ouvrent la voie au contrôle spatio-temporel de la formation de tissus tout en cartographiant de manière non destructive leur rhéologie en temps réel, en utilisant leurs propres cellules constitutives comme actionneurs internes.

Références :

Méry A, Ruppel A, Revilloud J, Balland M, Cappello G & Boudou T. Light-driven biological actuators to probe the rheology of 3D microtissues. Nat. Commun.14, 717 (2023). doi:10.1038/s41467-023-36371-w

microtissu

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Thomas BOUDOU
Bureau 125
thomas.boudouatuniv-grenoble-alpes.fr (thomas[dot]boudou[at]univ-grenoble-alpes[dot]fr)

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Les globules rouges se contorsionnent pour notre santé !

Parution Le 6 février 2023

Des chercheurs ont montré que la déformabilité des globules rouges est un ingrédient essentiel pour assurer leur diffusion homogène dans le réseau terminal des vaisseaux sanguins, quand le diamètre de ceux-ci est à peine plus grand que la taille des globules.

La bonne circulation des globules rouges (GR dans la suite du texte) dans l’organisme est une question essentielle au bon fonctionnement du corps humain, car outre leur fonction bien connue de véhicules de l’oxygène respiré, ils transportent également de nombreux métabolites comme l’ATP, destinés à être livrés in fine aux organes via le réseau terminal des tout petits vaisseaux sanguins (les capillaires), dont le diamètre est à peine plus grand que la taille des globules eux-mêmes.

La loi de transport des GR dans ces microvaisseaux est restée très mal connue pendant des décennies. L’image classique qui a prévalu jusqu’à aujourd’hui supposait que dans chaque branche du réseau vasculaire l’écoulement sanguin ne dépendait pas de son trajet antérieur dans les vaisseaux sanguins en amont : les fluctuations thermiques, les désordres locaux de l’écoulement étaient supposés rendre les trajectoires aléatoires et les globules choisir aux intersections leur direction au hasard.

Dans un travail réalisé au Laboratoire interdisciplinaire de physique (LiPhy, CNRS / Université Grenoble Alpes), en collaboration avec l’Institut de mécanique des fluides de Toulouse (IMFT, CNRS / Toulouse INP / Université Toulouse – Paul Sabatier), et le Laboratoire ondes et matière d'Aquitaine (LOMA, CNRS / Université de Bordeaux), des chercheurs proposent un modèle qui précise, voire remet partiellement en question ce dogme. En effet, quand l’écoulement concerne les capillaires sanguins, ils montrent que la turbulence n’est plus opérante pour rendre chaotique le transport de particules individuelles rigides, qui sont alors advectées par l’écoulement de façon très prédictive, le long des lignes de courant. Quand une particule se présente à un carrefour, portée par la partie du flot qui se destine à « tourner à gauche » par exemple, elle va sans surprise faire de même si sa forme est suffisamment circulaire ou sphérique. Les chercheurs notent cependant qu’une forme rigide suffisamment allongée et asymétrique est susceptible de donner aux particules un esprit de contradiction à chaque carrefour et lui faire prendre une direction différente de celle du flot dans laquelle elle baigne majoritairement ! Ceci dit, cette opposition est systématique et induit de fait une trajectoire beaucoup plus prévisible et donc potentiellement dangereuse s’il s’agit de porter des nutriments de façon homogène dans un réseau de capillaires. La moindre sélectivité dans la distribution des GR dans le flot risque en effet de se traduire en aval par des inhomogénéités de répartition et d’induire un stress biologique dans des organes insuffisamment approvisionnés en GR.

Pour éviter cette sélectivité, essentiellement induite par le diamètre très faible des capillaires (et sans doute également pour éviter les occlusions vasculaires liées aux diamètres dangereusement comparables des vaisseaux capillaires et des GR), les chercheurs montrent que les processus d’évolution ont fait émerger une réponse extrêmement astucieuse, en dotant les GR d’une flexibilité qui les obligent à se déformer en arrivant aux intersections où le cisaillement change de façon importante. Cette déformation rétroagit localement sur l’écoulement et induit une chaoticité temporaire qui rend finalement aléatoire le choix par le GR de la direction en sortie de la bifurcation. Du point de vue plus global, l’exploration latérale du réseau des artérioles devient alors diffusive et assure une visite statistiquement homogène du réseau par une assemblée de GR distribués en amont de façon identique. De façon complémentaire, les chercheurs montrent aussi que quand la concentration de GR est suffisamment grande, les interactions entre GR induisent assez de perturbations dynamiques aux bifurcations pour générer également une diffusion normale, même en présence de globules plus rigides.

La portée de ce travail ne se limite pas uniquement aux globules rouges, mais reste valable pour toute particule déformable, comme les gouttes, les capsules, et les cellules à noyau (comme celles du système immunitaire ou les cellules cancéreuses). Cette étude pourrait donc aider à mieux comprendre les propriétés de transport d’un large éventail de systèmes, et guider par exemple la conception de circuits microfluidiques pour les biotechnologies lab-on-a-chip pour diagnostics et tris cellulaires. Ces résultats sont publiés dans la revue Physical Review Letters.

(Repris de l'actualité INP CNRS du 6 février 2023)

globule rouge
Trajectoires typiques des particules (de la gauche vers la droite). En noir, une particule sphérique rigide: initialement (tout à gauche) dans la partie supérieure du canal, elle impacte la première bifurcation légèrement au-dessus et continue donc dans l

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Chaouqi Misbah, Equipe Eccel
chaouqi.misbahatuniv-grenoble-alpes.fr (chaouqi[dot]misbah[at]univ-grenoble-alpes[dot]fr)

Communication INP CNRS
inp.comatcnrs.fr (inp[dot]com[at]cnrs[dot]fr)

Anomalous Diffusion of Deformable Particles in a Honeycomb Network

Z. Shen, F. Plouraboué, J. S. Lintuvuori, H. Zhang, M. Abbasi, C. Misbah, Physical Review Letters, paru le 03 janvier 2023.
DOI: 10.1103/PhysRevLett.130.014001
Archives ouvertes HAL

Dans les médias

Simulated blood cells anomalously diffuse through microfluidic channels
Physics Today

Memory of Blood Cells
Physics 16, s4

Mort cellulaire et dynamique du protéome

Parution Le 16 janvier 2023

Les organismes se sont adaptés pour prospérer dans une plage de températures étroite et bien définie. Les humains sont à l'aise dans des conditions ambiantes, mais d'autres organismes peuvent supporter des températures beaucoup plus élevées, même au-delà de la température d'ébullition de l'eau. La façon dont la température tue une cellule n'est pas complètement comprise, mais elle est cruciale à bien des égards. Par exemple, pour comprendre comment la vie a évolué sur notre planète, et comment elle peut potentiellement se développer ailleurs. Nous devons également tenir compte de la façon dont des changements de température, même minimes, dans l'environnement en raison des problèmes climatiques peuvent déséquilibrer la répartition actuelle des organismes vivants. Enfin, comment les approches thérapeutiques peuvent être optimisées pour tuer les cellules cancéreuses en augmentant localement la température des cellules.

Pour développer et simplifier l'histoire, utilisons une métaphore. Une cellule ressemble à une usine où les protéines représentent la laborieuse classe ouvrière. Elles transforment l'énergie et les composés, elles fournissent la force mécanique nécessaire à la mobilité et à la stabilité et elles décodent l'information génétique. Lorsque nous augmentons légèrement la température, l'efficacité de leur activité augmente. C'est comme un regain d'énergie. Elles ont plus de "force" et d'"énergie" pour accomplir la tâche. D'un point de vue physique, cela s'explique par ce que l'on appelle le facteur de Boltzmann. La température influe également sur un autre aspect, plus subtil, elle augmente le transport des matières à l'intérieur de la cellule. Cependant, lorsqu'une température critique est atteinte, les protéines sont déstabilisées. L'efficacité du travail est compromise. Revenons à la question initiale : à la température critique (connue sous le nom de température de mort cellulaire), est-ce que toute la classe ouvrière cesse de produire ou seulement une poignée de travailleurs, qui contrôlent des positions clés dans la chaîne de production, cessent leur activité ? 
Nous nous sommes récemment penchés sur la question (lire le manuscrit en accès libre ici), et avons trouvé un soutien à l'idée qu'une petite quantité de protéines se déplie et cesse d'être opérationnelle à la température de mort cellulaire. En parallèle, en fondant, les protéines modifient les propriétés dynamiques du milieu environnant. La viscosité locale augmente de façon spectaculaire. Dans un certain sens, selon notre métaphore initiale, c'est comme si, en se dépliant, elles ralentissaient toutes les chaînes de montage de l'usine. La raison moléculaire de cet effet n'est pas du tout surprenante. Lorsqu'une protéine se déplie, elle devient un spaghetti long et souple qui a tendance à coller les macromolécules environnantes et l'environnement commence à ressembler à un gel. En bref, les quelques protéines qui se déplient ne doivent pas nécessairement agir comme des enzymes pivots dans des schémas métaboliques critiques. Leur dépliage pourrait suffire à supprimer certaines réactions métaboliques contrôlées par la diffusivité locale. La question est ouverte.....

Plus d'info

Températue et mort cellulaire : une histoire de viscosité (CNRS)

folded

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Judith Peters
judith.petersatuniv-grenoble-alpes.fr (judith[dot]peters[at]univ-grenoble-alpes[dot]fr)

Diffusive Dynamics of Bacterial Proteome as a Proxy of Cell Death

L'origine physique du séchage intermittent des feuilles

Parution Le 28 septembre 2022

Les végétaux sont sensibles à la sécheresse, qui peut créer des embolies gazeuses pouvant bloquer la circulation de la sève dans les nervures. Des visualisations récentes à l'échelle de feuilles d'arbre ont montré que ces embolies n'envahissent pas les nervures de façon homogène et progressive, mais par bouffées intermittentes.

Nous avons mis en évidence l'origine de cette dynamique intermittente en créant une feuille biomimétique avec les éléments de base des feuilles réelles. Des éléments cruciaux du réseau des nervures sont les ponctuations, qui sont des rétrécissements nanométriques entre les cellules conduisant la sève ; nous les avons reproduites en insérant des constrictions entre des canaux microfluidiques plus larges, le tout inséré dans un matériau flexible et perméable à l'eau, comme le corps des feuilles.

Nous avons retrouvé une dynamique de séchage intermittente, caractérisée par un arrêt de l'embolie dans la constriction suivi d'un saut brutal à la sortie de la constriction. Nous avons montré que cette dynamique provient de deux phénomènes : l'accrochage d'une interface air/liquide sur les coins de la constriction, et la déformabilité du canal sous l'effet de la diminution de la pression de l'eau pendant la phase d'accrochage. Ainsi, dans les végétaux, les ponctuations jouent le rôle de piège capillaire à embolies... mais seulement pendant un temps limité.

Référence
Keiser, L., Marmottant, P., & Dollet, B. (2022). Intermittent air invasion in pervaporating compliant microchannels. Journal of Fluid Mechanics, 948, A52.

Benjamin Dollet benjamin.dollet [at] univ-grenoble-alpes.fr feuilles séchées
Invasion d’air intermittente dans les microcanaux perméables

Le son des bulles toriques

Parution Le 27 septembre 2022

Les bulles aquatiques ont une fréquence de résonance acoustique très marquée, comme en témoigne les bruits de bullage dans un verre avec une paille. Mais est-ce que cette résonance dépend de la forme des bulles ? Si les bulles sont le plus souvent sphériques, elles peuvent aussi être toriques, comme celles produites par les dauphins dans leur jeux aquatiques, qui sont l’équivalent de nos ronds de fumée.

Pour étudier à loisir les bulles toriques, nous les avons capturées dans des cages imprimées en 3D par la technique DLP, avec des ouvertures suffisamment petites pour empêcher l’eau d’entrer. Nous avons montré que leur fréquence de résonance est plus haute lorsque les tores sont fins, c’est à dire quand leur petit rayon devient très petit devant leur grand rayon. Ces bulles peuvent être assemblées pour produire des champs acoustiques originaux: par exemple dans un tunnel d’anneaux. 

Sous la mer, il est possible que les dauphins connaissent déjà ces propriétés acoustiques, car ils émettent souvent des sons lorsqu’il les produisent. Ils devraient être capable de détecter un glissando vers les hautes fréquences lorsque le tore s’agrandit et s’affine pendant son ascension.

Référence
M. Alloul, B. Dollet, O. Stephan, E. Bossy, C. Quilliet, and P. Marmottant Acoustic resonance frequencies of underwater toroidal bubbles Physical Review Letters 129, 134501 (2022)

Le son des bulles toriques
Le son des bulles toriques

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Mécanismes de migration des cellules cancéreuses

Parution Recherche Le 20 juin 2022

La migration des cellules dans les milieux 3D est un processus complexe et joue un rôle primordial dans le développement des cancers. Durant la métastase, les cellules cancéreuses développent une stratégie et un mode de migration adaptés à leur environnement pour aller envahir d’autres tissus.

Dans cette étude, nous avons analysé la migration de cellules cancéreuses (avec un potentiel métastatique plus ou moins importante) dans des gel fibreux de collagène. Cette étude a été réalisée sous microscope confocal en observant simultanément le cytosquelette d’actine et les fibres du collagène. Les champs de déplacement des fibres de collagène sont déterminés à partir d’une méthode de corrélation de phase. L’analyse de la forme cellulaire en parallèle avec le déplacement des fibres de collagène montre que les cellules les plus invasives sont caractérisées par une grande diversité de forme. Ces cellules produisent les plus grands déplacements de fibres et ceci quelle que soit la rigidité du gel de collagène. L’analyse détaillée des mouvements cellulaires a prouvé le fait que ces cellules cancéreuses étaient également capables de présenter différents phénotypes (mésenchymateux et amiboïde) en fonction de leur potentiel métastatique. Nous avons montré que les cellules peuvent pousser et/ou tirer sur les fibres de collagène afin de déformer de manière efficace le collagène et, de plus, les plus grands déplacements des fibres de collagène sont corrélés à la proximité de régions riches en actine.

Figure : Déplacements 3D des fibres de collagène autour d’une cellule cancéreuse en migration. La forme initiale de la cellule 3D est affichée en gris. La longueur et la couleur des vecteurs indiquent l’amplitude du déplacement en µm. Les grilles x, y et z sont en µm.

Voir en ligne : Laforgue, L., Fertin, A., Usson, Y., Verdie C. & Laurent V. Efficient deformation mechanisms enable invasive cancer cells to migrate faster in 3D collagen networks. Sci Rep 12, 7867 (2022)

arton

Combiner les fluctuations de la fluorescence et le photoblanchiment pour quantifier la densité de surface

Parution Recherche Le 9 mai 2022

La spectroscopie par fluctuations de fluorescence (FFS) est une technique assez répandue qui sert à évaluer des densités ou concentration de molécules, d’agrégats ou de particules dans des environnements biologiques (cellules, solutions, surfaces). En réalité, lorsque les espèces d’intérêt ne sont pas marquées en fluorescence de manière uniforme, ces techniques ne donnent pas de résultats quantitatifs.

Nous avons donc proposé de combiner la FFS avec le photoblanchiment et avons démontré théoriquement que, quelle que soit la distribution initiale des marqueurs fluorescents individuels sur les entités à compter, la brillance (mesurée par FFS) décroît toujours linéairement, fournissant ainsi deux résultats : la brillance des marqueurs fluorescents individuels et un paramètre dépendant de la moyenne et de la variance de la distribution de ces marqueurs sur les entités à compter. Nous avons expérimentalement démontré cette nouvelle méthode en utilisant une monocouche de streptavidines (faisant office de base d’accueil pour des échantillons biomimétiques) pour estimer la densité de surface de streptavidines, puis celle de molécules de biotines qui viennent s’y lier. La densité de la monocouche de streptavidine estimée avec notre nouvelle méthode s’avère en excellent accord avec des mesures, totalement indépendantes, par spectroscopie ellipsométrique.

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Nous présentons une nouvelle méthode, auto-calibrée et appelée pbFFS (pour photobleaching fluctuation fluorescence spectroscopy) dont l’objectif est de caractériser des molécules ou des particules marquées avec une distribution inconnue de fluorophores. Grâce au photoblanchiment, qui joue le rôle d’un paramètre de contrôle, la méthode pbFFS fournit des informations sur la distribution des marqueurs fluorescents et une estimation fiable de la densité ou de la concentration absolue des molécules d’intérêt. Nous faisons la démonstration théorique complète du principe de la méthode pbFFS et la mettons également en œuvre pour mesurer la densité de surface d’une monocouche de molécules de streptavidine, marquées en fluorescence et qui est utilisée comme couche de base pour élaborer des systèmes biomimétiques. La densité de surface mesurée par pbFFS est cohérente avec les résultats de l’ellipsométrie spectroscopique, une technique classique pour les surfaces. Cependant, la pbFFS présente deux avantages principaux : elle permet une caractérisation in situ (aucun substrat dédié n’est nécessaire) et peut être appliquée à de faibles masses de molécules adsorbées, ce que nous démontrons ici en quantifiant la densité de molécules de biotine-Atto qui se lient à la couche de streptavidines. Enfin, nous avons également appliqué le pbFFS à des molécules diffusant en solution, afin de confirmer la distribution des marqueurs fluorescents présents trouvée en surface. En conclusion, le pbFFS fournit tout un ensemble d’outils pour étudier les molécules marquées avec un nombre variable de fluorophores, dans le but de quantifier soit le nombre de molécules, soit la distribution des marqueurs fluorescents, ce dernier cas étant particulièrement pertinent pour les études d’oligomérisation.

Voir en ligne : Combining Fluorescence Fluctuations and Photobleaching to Quantify Surface Density” Julius Sefkow-Werner, Elisa Migliorini, Catherine Picart, Dwiria Wahyuni, Irène Wang, and Antoine Delon Anal. Chem.

fluctuation

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Antoine DELON
Bureau 103
antoine.delonatuniv-grenoble-alpes.fr (antoine[dot]delon[at]univ-grenoble-alpes[dot]fr)

Corréler des signaux radio grâce à la lumière

Parution Le 19 mai 2022

Des chercheurs ont imaginé une architecture optique afin de calculer de manière analogique la corrélation de signaux radios. Cette opération permettrait notamment de localiser avec précision des émetteurs radios, ou d’améliorer les performances de l’interférométrie optique en astronomie.

La corrélation de signaux est une opération fondamentale pour beaucoup d’applications utilisant l’imagerie ou la localisation. En astronomie, les techniques d’interférométrie offrent des images à haute résolution à partir de la corrélation des signaux reçus par différentes antennes ou télescopes. De même, on peut localiser un émetteur radio en mesurant par corrélation les retards relatifs des signaux reçus en différents endroits. Or, les techniques numériques qui réalisent habituellement cette opération sont intrinsèquement limitées par la cadence d’échantillonnage des convertisseurs, ainsi que par la capacité de traitement en temps réel. En pratique, la corrélation numérique ne permet pas de traiter des signaux radio dont la largeur de bande excède quelques centaines de MHz. Pourtant, la largeur de bande est un paramètre important, car elle est notamment synonyme de plus de flux en astronomie, et d’une résolution accrue dans le cas de la localisation d’émetteurs. Des chercheurs du Laboratoire interdisciplinaire de physique (LIPhy, CNRS/UGA) et l’Institut de planétologie et d’astrophysique de Grenoble (IPAG, CNRS/UGA) ont mis au point un nouveau concept d’architecture photonique qui calcule en temps réel la fonction de corrélation de signaux radio de manière analogique et qui est adaptée à des signaux ayant une bande passante comprise entre quelques MHz et quelques GHz. Ces résultats sont publiés dans la revue Optica.

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Figure : Mesure de la différence de temps d‘arrivée de signaux radiofréquences par corrélation photonique. Le signal dont le spectre est représenté en (a) est émis par l’antenne Tx (b). Deux antennes réceptrices (Rx1 et Rx2) captent le signal et l’envoient dans le corrélateur optique analogique (b). Le maximum de la fonction de corrélation donne la différence de temps de propagation du signal entre l’antenne émettrice et les deux antennes réceptrices. En déplaçant Rx2 (par pas de 1 pouce), on observe une translation de la fonction de corrélation, due à la modification du temps de propagation entre l’émetteur et Rx2 (c).
Ce concept est fondé sur l’interférométrie dite multi-hétérodyne et il consiste à donner en temps réel l’intégralité de la fonction de corrélation de deux signaux en calculant simultanément, pour plus de 200 valeurs de retards relatifs, les coefficients de corrélation croisée entre les signaux. Pour cela, les signaux radio sont transférés dans le domaine optique, puis envoyés dans une paire de boucles dont la fonction est de produire des répliques des signaux d’entrée décalées à la fois temporellement et en fréquence. L’apport principal de la méthode est cette architecture de double boucle qui permet de paralléliser le calcul de la fonction de corrélation. Le pas temporel du corrélateur, qui correspond à la différence des temps de parcours dans les deux boucles, est ajusté de quelques nanosecondes à quelques picosecondes pour traiter des signaux avec une bande passante allant du MHz au GHz. Les chercheurs ont appliqué cette architecture à la localisation d’émetteurs radiofréquences par différence de temps d’arrivée (figure) et obtenu une précision proche de 10 ps pour un temps d’intégration de 100 ms.
Il reste désormais à caractériser les performances de cette architecture pour l’appliquer à la localisation en temps réel d’émetteurs, wifi et téléphones portables par exemple. En astronomie, une expérience préliminaire d’imagerie du soleil par interférométrie radio à 10 GHz sera réalisée à l’IPAG afin d’évaluer l’intérêt de cette technique pour l’imagerie.

Voir en ligne : Multi-delay photonic correlator for wideband RF signal processing. G. Bourdarot, J.-P. Berger, H. Guillet de Chatellus ;Optica, paru le 24 mars 2022.

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